lundi, octobre 30, 2006

Votre envoyé spécial à Washington DC

Mardi, à 7H00 heure locale (13H pour les Français, je ne fais pas le calcul pour tous les autres...), deux PT Cruiser bleus (!) vont quitter la ville de Québec, Canada, en direction de Washington DC, USA.

A leur bord, 9 étudiants en Affaires Publiques et Représentation des Intérêts qui s'en vont voir la capitale mondiale du lobbying.

Au programme, rencontres avec:

Anita Epstein, inventrice du slogan "I Love NY" (avec le coeur à la place du love) et lobbyiste en chef du Mexique sur le dossier ALENA;

Eliott Feldman, lobbyiste pour le Canada dans le dossier ô combien épineux et à rebondissements du bois d'oeuvre;

les lobbyistes économiques et politiques de l'ambassade de France;

George W. Bush (nan, on a demandé, mais les services de la Maison Blanche ont refusé, on se demande encore pourquoi...);

Sam Smith, journaliste indépendant et observateur attentif de la vie politique américaine.

En prime, une visite du Congrès.

Le tout sur fond de fin de campagne électorale, les élections de mi-mandat du 7 novembre pouvant bien redonner une majorité aux démocrates à la Chambre des Représentants et peut-être même au Sénat.

Je vous propose de suivre quotidiennement nos pérégrinations, du départ sans doute sous la neige au retour, sans doute sous la neige aussi, en passant par les rencontres, les visites, les discussions, les impressions...

Sur Incertain Regard, à partir de mercredi matin!

PS: Je tiens à profiter de ce post publicitaire pour faire un point: vous êtes en moyenne une quarantaine à venir vous balader sur Incertain Regard chaque jour (par adresse IP, les gens qui viennent 2 fois ne sont comptés qu'une et ceux qui se connectent à partir d'une grosse maison comme l'IEP ne sont pas comptés), en provenance de 3 continents, et plus précisément ces deux derniers jours de France, d'Italie, de Roumanie, d'Allemagne, du Liban, du Canada, des Etats-Unis (Wisconsin et NY), de Pologne, de Colombie, de Slovénie, d'Angleterre et d'Espagne... Si ça dure, ça fait plaisir! Et pour que ça dure...n'hésitez pas à me faire part de vos remarques, commentaires, envie, idées, voire de vos textes si vous êtes en manque d'espace d'expression!

dimanche, octobre 29, 2006

Israël, munitions et droit international

Après les bombes à fragmentation et les bombes au phosphore, des bombes à l'uranium?

Des scientifiques du Programme de l'ONU pour l'Environnement (PNUE) auraient découvert des traces d'uranium dans des cratères creusés par des bombes israéliennes au Liban, selon une information du quotidien britannique The Independent. Attention, on parle d'uranium appauvri, pas de bombes nucléraires! Pourquoi utiliser l'uranium appauvri et pourquoi ça devrait être considéré comme un crime de guerre?

L'uranium est un métal très dur, qui, dans une bombe, permet de perforer blindages et bétons. Il s'enflamme à l'impact, créant un incendie très violent qui garantit la destruction de la cible. Lors de l'incendie, le métal se fragmente en très fine poussière...qui se diffuse au gré des vents, pénètre les organismes vivants et pollue l'eau. En outre, les carcasses détruites par l'Uranium Appauvri (UA) présentent une forte radioactivité. Utilisé lors de la Guerre du Golfe, puis dans les Balkans, l'UA pourrait être une des causes au "syndrome du Golfe" développé par bon ombre de vétérans US qui présentent des troubles neurobiologiques qui peuvent conduire au décès.

Il est avéré qu'Israël a utilisé des bombes à fragmentation et des bombes au phosphore au Liban, dans des zones civiles. Les premières, qui fonctionnent "à retardement", blessent ou tuent trois personnes par jour en ce moment même. Elles sont interdites par le droit international et par un accord qui lie Israël et les Etats-Unis selon lequel ces bombes (de fabrication américaine, bien sûr) ne doivent être utilisées que contre des "armées arabes organisées" ou "des cibles militaires clairement définies"...des notions floues. Les secondes, bombes incendiaires d'une rare violence (je vous mets pas de photo...), sont interdites par le Protocole III de la Convention sur la limitation de l'emploi de certaines armes classiques signé en 1983, selon lequel l'usage des bombes au phosphore est un crime de guerre. Israël et les Etats Unis ne sont pas signataires du Traité.

Israël joue toujours borderline, à la limite de l'acceptable d'un point de vue juridique, de manière à pouvoir produire une version des faits qui anihile la position internationale. Mais l'usage disproportionné et inhumain de la force, s'il n'amène pas les dirigeants israéliens au Tribunal Pénal International de La Haye, ne fait qu'augmenter le ressentiment des civils visés. Quel intérêt à ce qu'aujourd'hui, des bombes à fragmentation larguées pendant les trois derniers jours du conflit, alors qu'une sortie par les Nations Unies était évidente, dans des zones civiles, tuent encore?

Pour l'uranium, rendez-vous mi-novembre pour le résultat des analyses d'échantillons.

samedi, octobre 28, 2006

Lobbying : les Verts au créneau

Sans doute suite à la lecture de mon indigeste post sur le lobbying, le Sénateur Vert Jean Desessard appelle de ses voeux la création d'une commission parlementaire d'enquête sur le lobbying, afin de "nous doter de règles aptes à départager le lobbying légitime du trafic d'influence".

Cette demande vient (bien) après que la presse ait découvert que Suez, dans le cadre de la discussion du projet de fusion avec GDF à l'Assemblée Nationale, avait invité un certain nombre de parlementaires à assister à la finale de la Coupe du Monde de football dans la loge privée de Suez, parmi d'autres petites atentions. Une vingtaine de parlementaires semble avoir accepté, ceux qui ont refusé ne l'ont fait que pour des raisons de "disponibilité", selon Suez.

Une synthèse intéressante des techniques de lobbying utilisées par Suez, que l'on jugera pour certaines "légitimes", pour d'autres "illegitimes" (en se basant sur la morale...), a été faite dans un article de Libé de juillet.

La morale n'est pas bonne conseillère en politique (ni nulle part ailleurs? mais c'est un autre débat!). Une loi, vite, une loi!

Ah oui, aussi, ça aurait été sympa de la part de Desessard de refiler le bébé à Voynet, ça lui aurait permis de se montrer un peu... Comme l'écrit Le Monde, elle est assez inaudible ces temps-ci. Faut l'aider, Jean!

vendredi, octobre 27, 2006

L'extrême droite rejoint la coalition au pouvoir en Israël

Avigdor Liberman, fondateur du parti Israël Beiténou ("Notre Maison Israël"), a été invité par Ehoud Olmert, Premier Ministre, à rejoindre la coalition au pouvoir en Israël.

L'objectif de Liberman et de son parti est d'aboutir à "deux Etats ethniquement homogènes". Pour cela, il propose d'échanger les terres sur lesquels résident les 1.3 millions d'arabes israéliens (qui sont en fait présents un peu partout à l'échelle du pays, même s'ils se concentrent localement dans des quartiers ou village) contre les colonies, qui seraient annexées. Son parti a proposé une loi forçant tous les Israëliens à jurer allégeance à l'Etat juif, sans considération pour leurs origines ethniques. Economiquement, Liberman est partisan d'une privatisation des sociétés publiques et d'une réduction des bénéfices sociaux alloués par l'Etat.

Dans un article paru sur le site de Gush Shalom, Uri Avnery, écrivain israélien, fait un parallèle entre Von Papen, qui a permis l'accession aux plus hautes responsabilités d'Hitler en Allemagne, et Ehoud Olmert.

C'est que, pour Avnery, si la proposition de Liberman d'échanger des territoires pour créer de l'homogénéité raciale n'a aucun chance d'arriver, en revanche cette elle pave la route à une autre idée, celle de l'expulsion pure et simple des arabes israéliens, sans compensation, et/ou de l'annexion totale des colonies.

Olmert n'avait pas le choix. Après sa gestion quelque peu hasardeuse de la guerre au Liban, il lui fallait renforcer sa coalition pour se maintenir au pouvoir. Il va donc nommer Liberman à un nouveau portefeuille, le "Vice-ministère chargé de contrer les menaces stratégiques contre Israël", pour s'attacher les 11 voix contrôlées par Israël Beiténou à la Knesset, le Parlement israélien.

Les travaillistes, qui font partie de la coalition au pouvoir, ont frémi. Ont menacé, pendant une demie journée, de quitter la coalition. Finalement, ils font preuve de "responsabilité nationale", et restent. Comme résume Gush Shalom:

A cynical Prime Minister
Devoid of values,
Who has got us
Into a superfluous war
In which hundreds were killed -
Has invited the
Prophet of ethnic cleansing
Into his government.

The Labor Party
That remains
in this government
Is clinically dead.

Pendant ce temps, rassurez vous, chez les Palestiniens, c'est la routine.

jeudi, octobre 26, 2006

Qu'est ce que le lobbying?

Lobbying, lobbying... Je vous sens déjà frissonner... Lobby des armes, lobby agricole, lobby pétrolier, lobby automobile... Brrrr... Que du beau monde...

Bon. Et si on essayait de dédramatiser?

On ne peut parler de lobbying sans parler de groupes. N'importe quel groupe : le club de tarot de votre grand-mère, Total, Greenpeace, les intermittents du spectacle, l'Olympique Lyonnais, l'Association des Maires de France... Tous ces groupes ont des intérêts à défendre : le Club de tarot veut avoir la salle de la Mairie plus souvent que le Club des Aînés Ruraux (si c'est pas du vécu, ça...), Total ne veut pas que son contrat avec l'Iran soit rendu caduque par un embargo, Greenpeace veut sortir du nucléaire, les intermittents du spectacle veulent une meilleure assurance-chômage, l'OL veut être introduit en Bourse, l'AMF souhaite que les transferts de compétences vers les municipalités soient accompagnées des transferts fiscaux correspondant, etc.

Jusqu'à nouvel ordre, c'est le "monde politique" qui a le pouvoir d'accéder à la plupart des souhaits des autres acteurs de la société. Dans "monde politique", on peut mettre les élus du peuple, les fonctionnaires (qui vont préparer puis mettre en oeuvre une Loi, par exemple), les juges...que nous désignerons par le terme générique de "titulaire de charge publique" (TCP).
Du coup, les groupes vont tenter de faire valoir leurs intérêts auprès des TCP adéquats (le Club de tarot n'ira pas errer à Bruxelles pour obtenir la salle des fêtes le 4 décembre). Cette tentative d'influencer les décisions des TCP est choquante dans le cadre de la démocratie rousseauiste, où l'intérêt général n'est pas la somme des intérêts particuliers, ou de la "démocratie d'équilibre" (MacPherson) dans laquelle on élit des représentants tous les 4 ou 5 ans, et c'est bien suffisant.

Par contre, parlons démocratie participative. Qu'est ce que lq démocratie participative? C'est celle où le citoyen participe à l'élaboration des politiques publiques. Très bien. D'où acte : Juppé a instauré les Conseils de quartiers à Bordeaux. Sauf qu'un "citoyen tout seul" ne va disposer ni du temps ni des compétences pour bâtir une position argumentée sur un sujet général. Du coup, à Bordeaux, aux Conseils de quartier, on parle crottes de chien (spécial dédicace au seul que je connaisse qui soit allé plusieurs fois dans ces conseils). Les citoyens ont intérêt à se regrouper et à partager leurs compétences pour être plus forts face aux fonctionnaires de la Mairie qui, eux, connaissent les dossiers puisque c'est leur travail. Du coup, si on veut une vraie démocratie participative (ce qui n'est évidemment pas le cas à Bordeaux), on a intérêt à encourager la formation de groupes organisés qui vont défendre leur point de vue.

Ce qui est vrai à l'echelle de Bordeaux l'est aussi à tous les autres niveaux. La démocratie se conçoit aussi comme un jeu entre des groupes d'intérêts rivaux arbitré par les TCP.
Alors, où est le problème? En fait il y a deux reserves à cette conception du "paradis pluraliste" (Truman) : il faut préciser qui peut participer au match et à quelles conditions, et il faut fixer des règles du jeu. C'est là que ça devient intéressant.

Vous n'êtes pas dupes. Ma démonstration ne vous a pas convaincus, vous vous dites que c'est bien joli, mais le lobby agricole français (FNSEA) gagnera toujours contre les paysans sud-américains. Que les constructeurs automobiles gagneront toujours sur les écolos. Pourquoi vous vous dites ça? Parce que vous considérez que les constructeurs automobiles sont prêts à mobiliser plus de moyens et d'énergies ("ils ont des sous et des contacts") que les écolos, qui militent au sein d'assos sans moyen, et avec un réseau modeste (je renvoie les politologues au paradoxe d'Olson : incitations selectives plus fortes dans le cas d'un groupe restreint et avec des avantages matériels distinctifs à la clé que dans un groupe plus étendu avec seulement des avantages symboliques). Vous avez raison. Enjeu N°1: garantir à tous une place sur le terrain. Autrement dit : que tous les groupes aient l'opportunité de se faire entendre des TCP. Je vous ferais remarquer tout de même que des ONG comme Greenpeace ou Oxfam réussisent plutôt à se faire entendre. Mais il reste beaucoup de travail, je vous l'accorde. Comment faire...? (suspens insoutenable, non?)

Ca passe par l'imposition de règles du jeu identiques pour tous. Concrètement, l'influence des TCP peut se faire de plusieurs manières : prendre contact directement avec un TCP, mobiliser l'opinion publique pour influencer indirectement les TCP, organiser une coalition avec d'autres groupes partageant les mêmes intérêts, financer les campagnes électorales (aux USA) ou offrir des cadeaux ou services au TCP (P.Robert). Les organisations citoyennes, ou civiques, ou "à vocation sociale" selon la terminologie d'une camarade ont des avantages dans certains cas (opinion publique, coalitions) et des désavantages dans d'autres (financement campagnes électorales, cadeaux). L'idéal démocratique impose une recherche minimum d'égalité: il faut encadrer les pratiques de lobbying pour que la victoire que remportera Greenpeace en présentant un mémoire béton devant une commission thématique du Parlement Européen ne soit pas annulée par un coup de fil bien placé de Monsanto (dossier OGM) ou par des "séminaires" organisés par EDF aux Seychelles pour les députés (exemples fictifs).

Or encadrer les pratiques de lobbying impose de reconnaître une légitimité au lobbying. Ce n'est pas le cas en France, et on est timide à Bruxelles sur cette reconnaissance (pourtant, Bruxelles est la deuxième capitale mondiale du lobbying après Washington, avec 15 à 20 000 lobbyistes). Du coup, pas de législation. Du coup, "porte ouverte à toutes les fenêtres".

Vous avez peut-être entendu parler du scandale Abramoff aux Etats Unis. Ca vous fait dire que le lobbying c'est mal? Ca me fait écrire que si le lobbying avait pas été reconnu aux Etats Unis, il n'y aurait pas eu de Loi sur le sujet comme c'est le cas. Du coup, Abramoff aurait pas été obligé de publier ses comptes. Du coup personne n'aurait rien vu...et il n'y aurait pas eu de scandale. Du feu, mais pas de fumée.

Conclusion : il est légitime que le Club de tarot fasse du lobbying sur le Maire pour avoir la salle. Mais si il n'existe pas de cadre juridique pour ce lobbying, il est possible que le Club des Aînés, aux ressources plus grandes grâce à la vente de gateaux au chocolat, offre au Maire une part de gateau décisive... Au contraire, si les deux Clubs sont conviés à présenter publiquement des dossiers à une Commission d'attribution de la salle présidée par le Maire, le dossier le plus convaincant l'emportera. Un petit exemple frappant : le recul du lobby cigarettier face aux lobbies de patients, de médecins, etc.

Voilà.

Le débat est ouvert, je n'ai pas abordé l'aspect communicationnel du lobbying pour privilégier l'aspect plus politique.

Je ne resiste pas : quelques lobbies auxquels vous n'auriez peut-être pas pensé: le lobby européen des femmes, la campagne internationale pour l'interdiction des mines antipersonnel, la méthode Greenpeace, le Syndicat des Energies Renouvelables...



mercredi, octobre 25, 2006

Débat DSK/Royal/Fabius version 2.0


Deuxième débat, on m'avait promis que ça parlerait au moins un peu d'écologie, et puis rien, je me sens floué.


Le bon côté, c'est que ça s'anime un peu. DSK m'a semblé un peu en deça de sa performance la semaine dernière, confortant l'image économico-centrée qu'il traîne. Fabius passait mieux à l'image, quant à Ségo, si je l'ai trouvé un peu rigide, je me dis qu'elle n'a pas trop le choix pour s'imposer face à ces deux mâles rôdés. De Condy à MAM en passant par Merkel (et à l'exception de Sirleaf au Liberia), l'âge 1 des femmes en politique semble devoir être marqué par une obligation d'austerité pour paraître crédible. Vivement qu'elles se détendent.

Un compte rendu marrant et finalement assez exhaustif du débat d'hier est sur le blog de Phersu.

PS: Le post sur le lobbying arrive...

mardi, octobre 24, 2006

Conditionnel prudent...

Le Monde (qui a pourtant des correspondants sur place) ne fait pas confiance à Haaretz:



En voilà, une découverte!

(en photo, Har Homa, colonie israélienne près de Bethlehem)

Allez donc faire un tour sur PictureBalata, un projet photo des gamins du camp de refugié, ça vaut vraiment le coup.

Classement RSF : le cas particulier des Etats-Unis et d'Israël

Le classement Reporters Sans Frontières 2006 de la libérté de la presse par État vient d'être publié. La France perd quelques places, aujourd'hui au 35ème rang mondial comme vous pouvez le voir sur cette jolie carte. Mais ça, vous devez le savoir, avachis devant TF1 ou lecteurs assidus du Monde : je suppose que la perte de terrain de la France y est traitée abondamment.

C'est pour partager quelques modestes réflexions que je vous écris. Quelques réflexions qui ne servent pas à grand chose et dont je ne ferais pas une analyse surpuissante dont vous auriez pu user afin d'éblouir votre conf' de CG ou toute la famille lors du repas de la Fête des (reporters?) Morts, mais tout de même, quelques réflexions.

Quand j'ai regardé le classement entier, et ses versions 2005, 2004, 2003, 2002, plusieurs petites choses m'ont semblé mériter être notées. En vrac :

- Depuis 2003, les Etats-Unis et Israël bénéficient d'un découplage de leur classement entre attitude interne et externe. Utile, pour savoir où si situent les problèmes. Mais dans le classement final, les États ne devraient-ils pas assumer l'integralité de leur actions vis à vis des journalistes? Une démocratie est-elle en droit de négocier la libérté de la presse quand elle s'estime en état de guerre?

- cette deconnection permet a ces deux Etats de conserver une presence dans le premier tiers du classement : entre 2002 et 2006, 17ème, 31ème, 22ème, 44ème et 53ème rangs pour les USA et 92ème, 44ème (notez le progrès dès qu'on distingue interne/externe), 37 ème, 47ème et 50ème pour Israël.

- alors que leur "passif" plane autour du 120ème rang de moyenne pour les USA hors frontières et autour du 130ème pour Israël en territoires occupés/hors frontières (Liban 2006)

- en 2002, en pleine Intifada, l'Autorité Palestinienne (que l'on trouve ici classée avec des États, ce qui en soit est un non-sens) occupait le 82 ème rang, alors qu'Israël (non séparé) occupait le 92 ème. La "seule démocratie de la région" avait un peu de concurrence pas loin...

- le 134ème rang de l'Autorité Palestinienne en 2006 illustre bien, outre le facteur principal qui est le désordre ambiant dans les Territoires occupés, ce qu'une partie de la société civile palestinienne appelle la "dérive sécuritaire" de l'AP.

Il y a bien sûr beaucoup d'autres choses à écrire sur ce(s) classement(s), si quelqu'un souhaite s'exprimer sur d'autres régions du monde et manque d'espace d'expression, Incertain Regard Inc. est preneur!

lundi, octobre 23, 2006

Ancien détenu de Guantanamo sur nouvelobs.com


Un Français qui a été détenu a Guantanamo pendant une trentaine de mois s'est fait interroger par des internautes grossiers, incultes et mauvais en orthographe sur Nouvelobs.com.

Je ne connais pas l'histoire du gaillard (qui apparemment sort un bouquin ces temps-ci), mais la lecture du forum, ne serait-ce que sur la forme, a failli me faire rendre mes pâtes au beurre de ce midi (particulierement lourdes cela dit en passant). Je me devais donc de partager ça avec vous, non?

jeudi, octobre 19, 2006

"Notre véritable patrie est notre peau."


"Un homme mort est un homme mort. Il n'est qu'un homme mort. Il est plus, peut-être aussi moins, qu'un chat ou qu'un chien mort. [...]. Au milieu de la route, là, devant moi, gisait l'homme écrasé par les chenilles d'un blindé. Quelques Juifs arrivèrent et se mirent à décoller de la poussière ce profil d'homme mort. Ils soulevèrent tout doucement avec la pointe de leur bêche les bords de ce dessin, comme on soulève les bords d'un tapis. C'était un tapis de peau humaine, et la trame était une mince armature osseuse, une véritable toile d'araignée faite d'os écrasés. On eût dit un vêtement amidonné, une peau d'homme amidonnée. La scène était atroce, légère, délicate, lointaine. Les Juifs parlaient entre eux, et leurs voix me parvenaient douces et éteintes. Quand le tapis de peau humaine fut complètement détaché de la poussière, un de ces Juifs y piqua la pointe de sa bêche, du côté de la tête, et se mit en route avec ce drapeau.

Le porte drapeau était un jeune Juif aux cheveux longs retombant sur ses épaules, au visage pâle et maigre, où les yeux brillaient avec une fixité douloureuse. Il marchait la tête haute, portant comme un drapeau, à la pointe de sa bêche, cette peau humaine qui pendait et se balançait dans le vent comme un véritable étendard.

Et je dis à Lino Pellegrini qui était assis près de moi:
"Voilà le drapeau de l'Europe, voilà notre drapeau. [...]. Qu'est ce qui est écrit, sur ce drapeau?
- Il y est écrit qu'un homme mort est un homme mort.
-Non, dis-je, lis bien: il y est écrit qu'un homme mort n'est pas un homme mort.
- Non, dit Pellegrini, un homme mort n'est qu'un homme mort? Que veux tu que ce soit, un homme mort?
- Si tu savais ce que c'est qu'un homme mort, tu ne dormirais plus.
- Maintenant je vois, dit Pellegrini, ce qui est écrit sur ce drapeau. Il y est écrit: il faut que les morts ensevelissent les morts.
- Non, il y est écrit que ce drapeau est celui de notre véritable patrie. Un drapeau de peau humaine. Notre véritable patrie est notre peau."

Un aperçu de La Peau (La Pelle, en VO, pour les lecteurs de Turin et environs), de Malaparte, excellent bouquin qui narre la présence des Américains en Italie, et surtout à Naples, à la fin de la seconde guerre mondiale, avec son cortège de contradictions.

C'est la suite de Kaputt, qui décrivait plutôt la présence des Allemands, et c'est beau de bout en bout. Ca fait rire (un peu amer, le rire, en général), pleurer (à chaudes larmes), ça choque, il y a des scènes d'une horreur rare, sublimée par un humour mélancolique et déséspéré.

Allez, je le classe au Top 5 des mes lectures des 2 dernières années (pendant lesquelles j'ai peu lu, ce qui relativise mon jugement, je vous l'accorde).

Prochaine fiche de lecture: Ecrits politiques, d'Habermas. Pour mes insomnies...

mercredi, octobre 18, 2006

Total et lobbying à la française


Vous avez tous entendu parler de la volonté de l'Iran de se doter de l'arme nucléaire à courte échéance. Vous avez tous entendu aussi que le dossier iranien n'allant pas "comme il faut", c'est à dire pas dans le sens souhaité par les Etats-Unis et l'Europe, des sanctions sont régulièrement évoquées. Bon, ces jours-ci c'est plus calme, on s'inquiète plus de ceux qui ont déjà leur bombe que de ceux qui vont l'avoir. Mais quand même.

Des sanctions, donc. C'est quoi, des sanctions, dans le cas d'un pays comme l'Iran, qui est le quatrième pays exportateur de pétrole au monde et qui possède les deuxièmes reserves de gaz naturelles au monde? Après des sanctions financières, qui sont à l'ordre du jour actuellement, ce pourrait être un embargo.

Et ça, ça ne plaît pas à tout le monde. Par exemple, ça ne ferait pas les affaires de Total, notre pétrolier français, la compagnie ayant signé en 2004 un accord avec Téhéran qui lui permet d'exploiter le gisement de Pars-Sud, supposé représenter la moitié du gaz iranien (la moitié de la deuxième reserve mondiale, comptez, c'est pas mal).

En même temps, vous et moi, on considère que l'AEIA, l'ONU, le Traité de non-prolifération, tout ça, c'est plus important. Eh bien apprenez (ou n'apprenez pas, si vous avez lu cet article du Monde) que rien n'arrête Total: hors de question qu'il y ait des sanctions vis à vis de l'Iran. D'où intervention au plus haut niveau (entendez : directement auprès de Chirac et Villepin) pour éviter que le dossier ne "dégénère".

Je me permet tout de même de vous faire remarquer que le lobbying de Total n'est en fait pas du lobbying. J'ai voulu bosser sur le sujet, étudier les stratégies d'influence de Total sur nos dirigeants politiques. J'ai rapidement abandonné, quand j'ai vu que Jérôme Monod, conseiller proche de Chirac et disposant bien sûr de son bureau à l'Elysée, était également...administrateur de Total. Voilà le "lobbying" à la française! C'est de la collusion. Pas très transparent, pas du tout reglementé, et pourtant, on peut pas dire que ce soit pas efficace... Avant d'abandonner mes recherches, un peu dégoûté, j'ai recensé les rencontres Chirac-Desmaret (PDG de Total). Dîners au sommet (à 4 avec Poutine et un autre russe, par exemple...), voyages d'affaires, les deux sont des familiers. Gageons que Monod n'est pas pour rien là-dedans.

Montréal 5 / Calgary 4


C'est le score de la game (du match...) de hockey de la soirée. Le gardien de Montreal, notre contribution française à ce joli sport puisqu'il vient de Grenoble, n'a pas assuré, mais les attaquants étaient là et ont mis le feu au Pub.

Je ne sais pas si vous avez déjà vu un match de hockey. Ca va vite, très vite. On sent que le cameraman a régulièrement besoin de sortir l'oeil de son viseur pour voir où est la rondelle (le palet...). Les joueurs s'explosent littéralement contre les parois de la patinoire ("commotions fréquentes", selon Félix, commentateur officiel pour nous autres néophytes), les arbitres ont un rôle de pères des joueurs. Du genre "nan, allez, ne le tape pas, sois plus intelligent que lui, arrête, écoute, sois raisonnable", en face d'un mec bardé de protections, avec un bâton (une crosse...), et, bien sûr, énérvé. Au foot, les cartons jaunes fuseraient. Au hand, les rouges bien sûr.

5-4 à une minute de la fin. Arrêt de jeu. Mais que se passe t'il? La tension est insoutenable dans la salle. "L'équipe déficitaire fait sortir son goaler (goal...) pour faire rentrer un attaquant de plus. Le problème, c'est que souvent, ça marche" (Roxane, commentatrice adjointe pour les néophytes que nous sommes restés). Vous voyez le concept? Pour sauver le match, l'équipe qui perd met un attaquant de plus, soit 6 joueurs de champ contre 5+le gardien. La dernière minute est intense. Un dégagement des rouges (les Canadiens de Montréal) semble devoir sauver leur victoire... Mais à quelques secondes de la fin, le palet est de retour du côté des buts montréalais. Confusion, supsens, on ne voit rien, mais où est le palet??? Un gros tas de joueurs, et puis l'arbitre lève les bras, clameur, c'est fini...

...fin du match, belle victoire de Montréal dans ce "clash des civilisations" (hum, disons que le Québec et l'Alberta, c'est pas l'amour fou...). Très belle partie, bien meilleure que celle de samedi où le jeu était confus, et où, d'ailleurs, Montréal a dû s'incliner face à Ottawa pendant les pénalités (les tirs au but, quoi).

S'ensuit une discussion extérieure (et donc fraîche...) sur le "complexe parisien" des Montréalais vis à vis du reste de la Province. Montréal, la ville de toutes les potentialités, versus Québec, la ville historique de fonctionnaires, proche de la nature.

Ca tombe bien, Québec City n'a plus d'équipe de hockey. La cohésion nationale est préservée.

Débat DSK/Royal/Fabius


Je n'ai malheureusement pas pu suivre en intégralité le débat, aussi mon avis est soumis à votre validation. De ce que j'ai vu, et de ce que j'ai pu lire des comptes rendus à chaud qui en étaient faits, je retire deux choses.

Tout d'abord, je n'ai pas entendu parler d'écologie ou d'environnement, et dans ce qui a été retranscrit par Libé, Le Monde et Le NouvelObs dans leur version eléctronique, rien non plus pour l'instant. Un peu inquiètant, non, quand on considère qu'une très grande majorité des Français se préoccupe du sujet (source)? [edit:voir commentaires]

Ensuite, environnement mis à part, DSK m'a paru le plus pertinent (mais il avait mes faveurs a priori), Royal m'ayant énérvé en passant plusieurs minutes sur les délocalisations alors qu'on attendait d'elle qu'elle parle des 35H (qu'elle avait attaquées il y a quelques temps). Et puis, s'accorder comme un bonus, mais sans l'avouer, la petite blague sur sa féminité à la fin, alors qu'elle joue la victime ("vous ne me poseriez pas la question si j'étais un homme", Iepiens je ne vous apprend rien) sur ce sujet, ça passe pas.

DSK, pas écolo, tout à gagner à faire une (belle/vraie/équitable/sérieuse) alliance avec les Verts!

mardi, octobre 17, 2006

Nationalisme québécois, masochisme français?


Pour ne pas généraliser, posons le cadre du débat. Prenez 3 ou 4 étudiants québécois en Science Politique, le même nombre d'étudiants français dans la même discipline. Mettez les autour d'une (plusieurs) bières ou d'un plat de pâtes, sur un balcon (importance du facteur température!) ou dans une cuisine communautaire. Laissez les discuter... Ils en arriveront sûrement à s'interroger: pourquoi les Québécois de l'échantillon sont-ils fiers d'être québécois, alors que les Français "sont beaucoup plus durs avec eux-mêmes"? Autrement dit, pourquoi, à l'heure de la mondialisation des idées et des comportements, des jeunes aux parcours relativement comparables en arrivent à des attitudes aussi contraires vis à vis de leur nation?

Réponse personnelle, et manière de botter en touche: jouer sur les mots. On peut être fier d'un truc qu'on a fait, d'un évènement organisé, d'un boulot fini, d'un bon match ou autre. Mais comment être fier de quelque chose qu'on a pas fait? Comment être fier des pages glorieuses de la France, alors qu'on aurait peut-être été tortionnaire en 1957, collabo en 1942, anti-dreyfusard en 1898? Un peu facile...

Un mot-clé pour les Québécois: homogénéité. C'est vrai qu'ici, les gens sont majoritairement catholiques, francophones et plutôt blanchouilles. Et ça fait un bout de temps que ça dure. Du coup, ça permet une identité forte, qui traverse les générations et forme un "tout" intemporel dont peuvent se réclamer les jeunes. Mais moi, je m'en fous, de vivre qu'avec des gens comme moi, au contraire, le projet de mélanger tout le monde, d'égalité, de droit du sol, tout ça, ça me plaît!

Alors...? L'Union Européenne, qui fait que nous travaillons à dissoudre notre identité nationale dans une supra-identité, alors que les Québécois connaissent le mouvement inverse de lutte nationale contre l'envahisseur canadien (phrase historiquement inexacte, mais politiquement acceptable, non?)? Peut-être... La place du drapeau au Québec rappelle celle qu'il occupe en Palestine: la lutte contre un adversaire extérieur oblige à se doter de symboles forts. Quel étudiant en France accrocherait un drapeau français dans sa chambre? Hum, pas fréquentable... Pourtant ici, les fleurs de lys sont partout...

On peut chercher à affiner. On l'a fait: s'il y a une chose dont nous sommes fiers, c'est du "système français". Le système social, éducatif, de santé, tout ça, vous voyez. La belle affaire. Un système qu'on nous dit périmé, inadapté, dégénéré (je ne vous fait pas l'affront d'aller chercher les citations de Sarkozy, entre autres), et c'est à ça que l'on raccroche notre fierté?

Le Québec se présente comme une Nation jeune et en devenir, avec un projet fédérateur - l'indépendance - qui n'a par essence aucune chance de se réaliser sans les nouvelles générations. A l'opposé, la destruction systématique mais néanmoins graduelle des valeurs sur lesquelles s'est construite la France, qui portent pourtant en elles un potentiel fédérateur fort, alors que les valeurs européennes peinent à se structurer et à se faire connaître, enlève toute prise à une quelconque fierté. Pas de modèle, pas de fierté.

Et comme on va pas refaire l'histoire à l'envers et se recréer un modèle français, faut se dépêcher de se créer un modèle européen. Et il faudrait le faire connaître, ce modèle, à tous, pour qu'on puisse se référer, dire, tiens, ça c'est cool, ça me plaît, j'adhère, c'est mon projet aussi. Ne pas être fier d'un pays, mais d'un projet. Ne pas être fier de frontières, mais de valeurs. Ne pas être fier de son sang, mais de politiques. Une sorte de "patriotisme constitutionnel", comme disait Habermas.

En somme, un an et demi plus tard, j'ai compris pourquoi il était urgent de se doter d'une Constitution Européenne véritable, sans Partie III, dont on puisse être fiers. Merci les Québécois.

Un peu de musique?

Une découverte assez foudroyante, K'naan, un rappeur d'origine somalienne qui est arrivé à Toronto vers 12/13 ans. Découvert par hasard (il assure la première partie d'Oxmo Puccino à l'Elysée Montmartre à Paris le 4 décembre, ce dernier venant de sortir un très très bon album, Lipopette Bar, conseillé aux allergiques au rap), il fait mon bonheur jour et nuit depuis quelques jours.
Quelques chansons particulièrement bien senties: The Dusty Foot Philosopher (titre de l'album), Blues For the Horn, Smile, et My old home.
D'ailleurs, il semble à la veille d'une tournée massive en Europe, lucky you.

J'en profite pour un peu de pub: K'naan était dimanche dernier sur les ondes de Chyz, 94.3 au Canada, ici sur le net, dans L'Omelette au pastis que vous pouvez écouter à 11H00 au Canada (17H en France, pas de problème pour écouter via le net) tous les dimanches! Une émission éclectique d'un gros, gros niveau!

lundi, octobre 16, 2006

C'est parti!


Un bon début pour un blog placé sous le signe de l'actualité, de la solidarité internationale, de l'écologie et de la découverte artistique et culturelle, c'est une petite photo de Kahori (le Japon en force!), fumant son narguilé (symbole de l'échange dans le plaisir) sur le toit de la maison de Mosab, en Cisjordanie, sous le regard d'Amoudi, le petit frère (photo de Zaz', avec tout mon respect pour sa fidélité à l'argentique). Je n'insisterais pas sur tous les liens interculturels, intergénérationnels, interministeriels (cherchez l'erreur) contenus dans cette photo: c'est simple, ça fait pleurer.

J'éspère que ce blog sera plus vivant que le précédent, que vous serez pas trop nombreux à le lire, et qu'il servira au moins à vous faire rire.

Aux blogosceptiques qui voient là un étalage de vie personnelle et autres délires malsains d'individus névrosés communico-déficients, je n'ai qu'une chose à dire: "je vous ai compris". Non, plus sérieusement, j'éspère ne pas partir dans des élucubrations sur ma vie, mon oeuvre et mes problèmes. Si c'est le cas, n'hésitez pas, enfermez-moi!

Encore une petite remarque: ceux qui me connaissent l'auraient deviné (ou pas), mais ce blog va être profondément marqué par le doute. Eh oui, j'estime qu'il n'y a pas grand chose dont on puisse être sûrs, alors autant en discuter...calmement.

Bonne(s) lecture(s)!

Un blog, pour quoi faire?

Parce que parfois j'ai envie de dire des trucs, et plutôt que de spamer la boîte de mes amis...
Parce que Pauline et Maxime m'ont trop donné envie...
Parce que Juppé est (bien, merci) rentré, et qu'un blog du Québec, ça vous manquait...
Etc...